L’histoire d’Elégance du Cygne commence par une naissance, sa propre naissance. La jeune chatte est née un jour de Saison des Neiges. Sa mère, Robe d’Argent, était une reine très respectée dans le Clan de la Rivière, et son père était un matou, inconnu de la plupart des chats de tous les Clans de la forêt. C’était un solitaire qui rodait souvent dans la forêt. Robe d’Argent l’avait rencontré lors d’une patrouille de chasse. Je n’ai pas besoin de vous raconter que Robe d’Argent tomba sous le charme du matou. Elle eut trois chatons de cette liaison, mais deux des petits moururent tôt, emportés par le Mal Vert. Seule Patte de Cygne survécut. Tous les chats savaient que c’était une battante, déjà toute petite, mais aucun ne l’accepta. Son origine floue ne plaisait pas aux membres de son Clan, et personne ne s’intéressait à elle. Le pire fût le jour où elle devait être nommée apprentie. Aucun guerrier ne voulait d’elle. Mais elle ne s’avouait pas vaincue, et décida d’apprendre seul. Les solitaires, comme son père, était capable de chasser et de se battre, pourtant ils n’avaient pas de mentors pour leur apprendre quoi que se soit. Patte de Cygne, qui n’avait pas le choix que de garder son nom de chaton, avait du sang de solitaire dans ses veines, elle n’avait jamais rencontré son père, mais elle l’aimait malgré tout, et elle prouverait à tous qu’elle était capable de faire comme lui, mais aussi d’être une future bonne guerrière, digne du Clan de la Rivière.
Durant beaucoup de lunes, Patte de Cygne s’entraina sans cesse. Elle passait des heures à observer les apprentis et les guerriers, à l’ombre des arbres ou cachée derrière des buissons. Elle analysait chaque mouvement et essayait tant bien que mal de les reproduire.  Elle devait beaucoup se remettre en question et personne n’était là pour la guider. Sa mère ne pouvait même pas l’aider, un Mal étrange s’était emparé de son corps, lui volant toutes ses forces. Elle vivait désormais avec les anciens, et regardait, impuissante, la détresse de sa fille, et la haine qu’éprouvait les autres chats à son égard. Elle voyait aussi sa fille se renfermer sur elle-même, devenir mauvaise avec les autres. Elle se créait une carapace, pour ne pas montrer qu’elle souffre de sa solitude et du fait que personne ne semble l’aimer.
Patte de Cygne décide de montrer au chef du Clan de la Rivière qu’elle sait se battre et chasser, méritant alors sa place en tant que guerrière. Les moqueries étouffaient s’étaient alors accrues, et sa rage ne faisait qu’augmenter. Un des guerriers ne faisant que s’en prendre à elle, nuit et jour. Un jour, alors que celui-ci lui rappelait encore sa basse naissance, la chatte blanche comme la neige ne réfléchit pas et sauta à la gorge du matou, au milieu du camp. Pris par surprise, il tomba à terre mais se releva vite et attrapa Patte de Cygne par le train arrière, plantant ses crocs dans la chair. La future guerrière sentit la douleur se répandre dans son corps, et lança un regard plein de haine à son assaillant. Elle lui lança un coup de pattes, toutes griffes sorties, qui arriva sur son visage, faisant perler le sang. Profitant de la douleur de son ennemi, elle lui flanqua un coup d’épaule dans le ventre, le faisant tomber à nouveau. Elle n’attendit pas qu’il se relève et bondit sur lui, lui attrapant la gorge. Ses mâchoires étaient prêtes à se refermer sur la veine jugulaire. Elle savait que si ses crocs pénétraient la chair à cet endroit, le sang se mettrait à couler abondamment, et aucun guérisseur, même le plus doué, ne pourrait arrêter l’hémorragie. Son adversaire le savait aussi. La terreur se lisait dans ses prunelles ambrées.

« Assez ! Patte de Cygne, lâche le maintenant, je pense qu’il a compris la leçon, et ne risque pas de l’oublier.
Griffe d’Aigle, ne te sens-tu pas humilier ? Te faire battre par une si jeune chatte qui n’a jamais reçu d’enseignements, je ne te félicite pas. Ton ancien mentor ne t’a-t-il jamais dit de ne pas sous-estimer tes ennemis ? Je vois que mes conseils ne t’ont pas marqué ! »


Le chef regardait son ancien apprenti, droit dans les yeux, le regard amusé. Griffe d’Aigle était un bon guerrier, mais il avait tendance à trop sous-estimer ses adversaires.

« Patte de Cygne, je ne conçois guère les combats entre mes propres guerriers, mais je dois avouer que tu t’es bien battue. Nous n’aurions jamais dû te juger sur tes origines, parce qu’aujourd’hui, tu nous as prouvé que ton ascendance ne jouait pas sur tes qualités, que tu pouvais être une vraie guerrière. Dorénavant, tous te parleront avec respect, je m’en assurerais personnellement. De plus, je pense qu’il est tant pour toi de rejoindre la tanière des guerriers. »


La joie éblouissait sur le visage de Patte du Cygne. Si les chats étaient capables de pleurer, des larmes couleraient le long de ses joies tant elle était heureuse. Elle avait réussi à leur prouver qu’elle était digne de devenir une guerrière du Clan de la Rivière. Mais sa route serait encore parsemée d’obstacles. Ce n’était pas parce que son chef déclarait que tout le monde devait maintenant la respecter, que du jour au lendemain, ils le feraient. Mais elle avait au moins gagné une bataille, la plus grande et belle des batailles.