Ce matin-là, Soleil d'Argent se leva de bonne humeur. Cela faisait quelques jours à peine que Cadratin Mélancolique était parti et l'avait nommé lieutenant, et il commençait à se demander quoi faire. Tout en dégustant un rouge-gorge, pour se caler l'estomac, le matou réfléchit au déroulement de la journée. Tout d'abord, organiser une patrouille. Les Marais restaient un territoire incertain, mais la frontière avec le Clan de la Rivière ne semblait pas bien définie. Sunny finit par se lever, sauta sur l'Aiguille et annonça :

- Aujourd'hui, je demanderais à tout le monde de remplir le Tas de Gibier. De plus, une patrouille sera organisée au Marais ce matin. Je prendrais sa tête.

Il descendit, et bientôt Chien Balafré s'approcha pour accepter sa proposition. C'est ainsi que le Guerrier argenté se retrouva dans les dangereux Marais, où soudain le sol disparaissait sous vos pattes et où la brume environnante rendait le lieu mystérieux et un peu effrayant. De grands arbres aux troncs noueux et aux branches tortueuses semblaient parfois sortir du brouillard, obligeant les chats à rester constamment vigilants de manière à ne pas sursauter, mais aussi à ne pas tomber dans un trou boueux d'où on était pas sûr de pouvoir sortir...

La truffe sensible de Soleil d'Argent frémissait sous les odeurs parfois âcres émanant du Marais, et il ne pouvait s'empêcher de marcher lentement, vérifiant chacun de ses pas tout en repérant la frontière avec le Clan de la Rivière. Il finit par s'arrêter pour marquer un arbre de son odeur, puis fit quelques pas vers la frontière, humant l'air en quête de l'odeur de la Rivière. Avec satisfaction, il s'aperçut qu'elle était très faible, et en profita pour marquer encore plus fort celle du Clan de l'Ombre.

Il finit par jeter un regard à Chien Balafré. Le Guerrier avait bien changé durant le Voyage, et il devait avouer qu'il se demandait parfois ce que le matou avait en tête. Il ne remettait pas en question le loyauté de ce dernier pour son Clan, non, il voyait bien que Chien Balafré donnerait tout pour son Clan. Par exemple, lorsqu'il était allé chasser seul pour les besoins des Reines. Non, ce qui l'ennuyait, c'était cette violence qu'il pressentait chez le matou brun. Il tenta de se raisonner. Sunny pensait en effet sincèrement que nul n'était foncièrement mauvais, mais que certains dressaient une carapace suite à certains événements. Et le Voyage avait été un de ces mauvais passages dans une vie.

Soleil d'Argent reporta ses yeux vert forêt sur les Marais, pensif. Il devait s'avouer qu'il ne parvenait pas à faire une confiance entière et totale à ce taciturne Guerrier, mais... il espérait sincèrement que le félin parviendrait à le faire changer d'avis.

   

Chien Balafré ne savait pas se qui l'avait prie. Jamais il ne se saurait cru capable de se porter volontaire pour une patrouille avec cet indigne de ses responsabilités. Il ne savait pas se qui lui donnait le plus la nausée, savoir qu'il était seul avec Lui ou les gaz toxiques qui s'échappaient parfois de flaques de boues. Pas un oiseau n'osait lâcher un mot. Pas un chat non plus. Malgré son dégout envers son lieutenant, il ne pouvait qu'essayer de se rappeler pourquoi il avait eu l'impression de le découvrir le jour de sa nomination en temps que lieutenant. Le matou marron se rappelait juste d'un chat qui ressemblait à Soleil avait quitté la Pouponnière quelques lunes avant lui. Ça devait être lui, il n'en était pas sur. Il n'avait pas réentendu parler de lui depuis. En tout cas, celui ci était devenu lâche avec le temps. Il était devenu un incapable. L'arrêt de son camarade pour marquer la frontière le tira de ses pensées. Il ne put y replonger. Tout ce qu'il trouva pour faire passer son énervement était un tronc un peu lisse d'un genévrier d'assez grande taille. Il nota dans sa mémoire de signaler le coin à Brise d'Été, mais il déchiqueta tout de même le tronc à coup de griffe, autant se défouler sur quelque chose. C'était toujours mieux que sur une proie ou sur Sunny. Sunny justement, n'était presque plus visible à cause de la légère brume qui enveloppait les deux matous, ainsi que la distance qui les séparaient. Le matou marron fit un tour d'horizon. Juste quelques buissons de houx, des genévriers, et des conifères. Au niveau animal, juste quelques empreintes de sangliers était visible dans la boue. Les champignons s’épanouissaient et poussaient par centaines dans cet environnement humide. Les sangliers avaient de quoi faire, mais ce n'était quand même pas une raison valable pour aller en rencontrer un au petit matin. Non, aucun gibier n'était visible aux alentours. Cet endroit était juste un nid à baies et à plantes pour les guérisseurs. Jamais Chien Balafré ne cédera ce territoire à l'ennemi. Un petit bruissement discret attira l'attention du matou. Ça venait d'un gros buisson d'une plante qu'il ne connaissait pas. La plante avait une odeur acre qui lui rappelait quelque chose de l'ancien territoire. Soudain, des yeux ambres apparurent. Ce n'était pas Soleil. Il était à sa droite, et n'avait pas les yeux ambre. Et ce n'était pas un lièvre égaré comme l'aurait espéré le matou. L'odeur acre lui repris la gorge plus violemment encore. En un instant, les deux regards se croisèrent. Chien eu juste le temps de hurler de courir. Le renard s'était élancé. Le combat avait commencé.

Note: Dans le combat, pas de "Chien Balafré était en mauvaise posture" ou autre On s'aide, mais si possible ne pas avoir besoin de sauver l'autre, surtout Chien dont l'honneur serait bafoué, que ce serai une tragédie, ect ect, tombe dans la folie,ect Donc pas de blessures graves et sauvetage que si nécessaire. Bonne Nuit, moi je go'
   

   

Soleil d'Argent s'était légèrement éloigné de Chien Balafré. Les yeux fixés sur la frontière, il songea que le Clan de l'Ombre n'avait pas les meilleurs territoires. Loin de-là. Le Bois qui longeait le Marais appartenait au Clan de la Rivière, mais... Soudain, un cri venu de derrière lui le fit sursauter. Chien Balafré lui hurlait de courir. Il se retourna vivement, se demandant ce qui pouvait causer ce semblant de panique dans la voix du plus jeune et il le vit.

Un Renard venait de sortir du brouillard, ses yeux ambres semblant briller de rage et son poil roux formant comme une auréole autour de lui. Sunny n'hésita pas un instant, et se jeta sur le canidé, déjà prit d'assaut par le matou brun. Luttant pour sa vie, et pour celle de celui qui l'accompagnait, il planta ses griffes dans l'épaisse fourrure. Mais il s'aperçut bien vite que cela était presque inutile : le pelage épais du Renard bloquait ses griffes. Le Guerrier gris sauta en arrière,chercha un autre angle d'attaque, vit du coin de l’œil que Chien Balafré semblait se débrouiller, et finit par passer sous le ventre de leur ennemi.

Là, rapide comme l'éclair malgré son apparente lourdeur (causée par l'épaisseur de sa fourrure et non par son poids réel), Soleil d'Argent sortit ses griffes et laboura le ventre du Renard, qui couina de douleur. Sunny eut un petit sourire mental : son instinct ne l'avait pas trompé, sur le ventre et les pattes les poils étaient bien moins longs. Cependant, il ne put éviter la patte arrière de la bête, qui lui entailla violemment la cuisse, provoquant un léger gémissement de la part du Guerrier.

Il se dégagea, sauta à nouveau sur ses pattes, ignorant la douleur lancinante qui parcourait sa patte, et parvint à se jeter sur le dos de l'animal roux. Là, il planta ses crocs, arrachant méthodiquement la fourrure. Les touffes de poils volaient, et le Renard tenta de se débarrasser de lui en se jetant au sol. Soleil d'Argent bondit juste à temps, atterrissant juste à côté de Chien Balafré. Haletant, la boue collée à son poil mi-long, le Lieutenant n'avait pas fière allure ! Il lança un bref regard au Guerrier à ses côtés, avant de se jeter à nouveau sur le carnivore. Il ne devait pas le laisser atteindre le Camp. Il valait mieux tenter de le tuer plutôt que le laisser en vie et le retrouver dans le Camp, tuant des Petits.

Griffant, mordant, tentant d'atteindre la jugulaire, Soleil d'Argent jeta toutes ses forces dans la bataille. Il mit dans un coin de sa tête l'ardeur que Chien Balafré montrait au combat. Il ne s'était pas trompé sur la loyauté du félin aux yeux de miel liquide. Il avait beau être impatient, voire violent, il restait un excellent Guerrier. Le Renard reculait de plus en plus, tentant visiblement de fuir.

Le renard lui avait sauté dessus sans lui laisser le temps de s'esquiver. Il eu juste le temps de lancer la patte et griffer l'animal au visage; la gueule ne l'atteignit pas, mais les pattes oui. Il sentit une des griffes de l'animal lui transpercer le mollet de sa patte arrière gauche; la douleur lui arracha un hurlement. Inexplicablement, tous les arbres autour du guerrier lui semblèrent se déformer, se louvoyer et se déplacer. Des branches tombaient, des lièvres se faufilaient entre ses pattes, sans se soucier du combat et des trous d'eaux. Il eu l'impression soudaine d'être recouvert de boue, ainsi que de sang. Plus rien ne lui semblait réel autour de lui, comme si son esprit n'était soudainement assez lucide pour correctement distinguer avec lucidité le monde extérieur. Tout se replaça brutalement autour de Chien. Le renard réapparu dans sa mémoire, ainsi que devant ses yeux. Il était couvert de boues et de sang. De son sang. Le renard avait la gueule grande ouverte, prête à l’attraper au cou. Le matou par reflex le mordit violemment à l'oreille, et s'extirpa de l'étreinte que créait le prédateur sur le lui, et arrachant au passage un morceau de chair, lui laissant seulement un morceau d'oreille déchiqueté sur la tête. La douleur lui vint brusquement, il sentit qu'il allait défaillir mais se concentra de toute ses forces pour oublier celle ci. Sa patte était ensanglantée, une entaille était ouverte, mais recouverte de boue. Le reste du corps était de même. L'eau stagnante à ses pieds se mêlait au sang qui s'écoulait de la blessure. Le chat n'eut pas le temps de vérifier si son lieutenant allait bien, le renard était déjà en train de se relever, dont se lisait sur le visage de la rage pur. Au diable son camarade. Qu'il meurt, se n'était pas le problème du moment, se dit-il. J'arriverai bien à me battre avec 3 pattes et ses crocs. Cette pensée le fit rire il voyait déjà le museau du renard se rapprocher de lui, apportant la mort avec eux. Soudain, l'animal se repoussa, lâchant un petit cri ridicule. Chien aperçu alors Sun qui se trouvait sous le ventre de l'animal, à lui déchiqueter la mince peau qui le protégeait. Cette scène lui fit reprendre ses forces. Encore sur le dos, à moitié dans la boue, il se retourna rapidement et sauta au cou du canidé. Du coin de l’œil, il vit Soleil qui se relevait péniblement, la cuisse en sang comme si il s'était fait marcher dessus. Décidément, ce renard ne savait pas faire attention à où il pausait ses pattes. Mais le lâche n'avait tout de même pas l'air de prendre le temps de se reposer, il re-sautait déjà sur le renard qui avait désormais deux guerriers plus ou moins entrainé à combattre les prédateurs. Ça devait le changer de tous les chats domestiques qu'il avait déjà du attaquer. Le renard battait déjà en retraite, comme si il se sentait dépassé par les évènements et que ceux ci ne s'étaient pas déroulé comme voulut. Chien redoubla d'efforts dans la bataille, décidé à ne pas le laisser s'échapper, en tout cas sans blessure. Mais, le guerrier n'eut juste le temps de griffer le prédateur à la paupière avant que celui ci ne commença à se retourner. S'élançant précipitamment vers les profondeurs des taillis, le renard qui devait être aveuglé par son propre sang, trébucha pitoyablement dans une racine, mais s'enfuit dans la seconde comme si rien n'était. Aux pied des deux guerriers, juste de la boue, du sang, et des touffes d'herbes retournés, le genévrier avait été arraché dans la bataille. Son trou à la patte ne semblait pas profond, le nerf était juste sous la peau, plus de peur qu'il ne pensait. Soleil d'Argent était debout à ses cotés. Il avait une cuisse entaillé, et le pelage recouvert de sang, certainement plus celui de son ennemi que le sien. Son regard croisa celui du guerrier. Le lieutenant ne laissait rien transparaitre, il espérait réussir à faire de même. Chien Balafré ne ressentait que de la haine quoiqu'un peu moins puissante qu'à l'habitude. Mais il ne lui était absolument pas reconnaissant de tout ça. Absolument de rien. Il n'était pas mort dans la bataille mais lui non plus. Ils avaient laissé s'échapper un renard, un danger pour le clan.

Alors que les deux Guerriers commençaient à avoir le dessus et que Chien venait de lui griffer la paupière, l'aveuglant presque, le Renard parvint à trouver une ouverture, tourna les talons et s'enfuit. Il trébucha, et Soleil d'Argent se prépara à bondir, mais il se releva immédiatement et disparut dans le brouillard et les broussailles. Pétrifié, ses flancs se soulevant rapidement, le Lieutenant sentit son corps se glacer. Ils l'avaient laissé partir. Un Renard rôdait sur leurs terres, et ils l'avaient laissé partir.

- Bon sang.

Sunny agita violemment sa queue, furieux contre lui-même. Il aurait dû arriver à le tuer. Ils étaient deux, ils auraient dû pouvoir... Il tourna ses yeux au vert assombri par la colère vers Chien Balafré, et se stoppa en voyant les blessures du matou brun. Le calme revint dans son regard. Une patte de Chien était blessée, et la boue et le sang se mêlaient sur son corps. Le Guerrier ne laissait toutefois pas la moindre trace de souffrance apparaître, ce qui conforta le gris dans son combat contre la douleur qu'il éprouvait à la cuisse. Le terrain qui les entourait, déjà pas forcément très esthétique du fait de la boue, des trous d'eau stagnante et du brouillard, était maculé de sang, de touffe de poils et d'herbe. Un genévrier avait été arraché par le Renard durant le combat.

- Nous devons retourner au Camp. Il faut avertir tout le monde. Je vais demander à ce que deux Guerriers restent toujours là bas en faction, il faut protéger les Anciens et la Pouponnière. Si jamais ce Renard parvenait jusqu'au Camp, nous devons être prêts.

Soleil d'Argent fit volte-face, inquiet. Même si le prédateur semblait être parti à l'opposé du Camp, avec toute cette brume, on ne pouvait pas vraiment être sûr. Et si il atteignait le Camp avant eux ? Et si... Il força le pas, courant presque, aussi vite que le lui permettait sa cuisse. Le sang coulait un peu, sali par la boue qui avait pénétré la plaie, mais le Lieutenant se dit qu'il irait voir le Guérisseur une fois l'annonce du danger passée. Danger qu'ils n'avaient pu éviter.

Bientôt, les deux Guerrier blessés furent hors du Marais, se ruant vers le Camp aussi vite que leurs blessures respectives leur permettaient. Sunny boitait bas, mais serrait les dents, tout don être fixé sur son objectif. Heureusement, lorsqu'ils parvinrent au Camp de longues minutes plus tard, le Renard n'y était pas, ce qui n'empêcha pas le félin argenté de prévenir les membres du danger présent.