Schrödinger
En temps normal, je ne fraie pas avec la racaille du bout de ma rue. Je me contente de passer devant eux, la queue dressée, le regard lointain. Non seulement ils ne m'intéressent pas mais je les méprise profondément. Une assemblée de commères, vieilles chattes moqueuses et félins désespérément coupés, qui piaillent pour combler la vacuité de leurs inutiles existences, dissertant sur des sujets aussi passionnants que les faits et gestes de leurs maîtres, la dernière morsure de chien...
Et pourtant, aujourd'hui, l'ambiance est différente. Ils sont trois, quatre groupes de domestiques en plein conciliabules, que je croise au cours de ma ballade du matin. Ma préférée, soit dit en passant. L'air est encore frais, les bipèdes dorment ou travaillent, je me sens reine du quartier, une chatte que rien n'effraie. Bien loin de la réalité...
Je disais donc, l'air est remplis de rumeur. Non pas que je m'intéresse véritablement aux faits et gestes de la plèbe... Mais les mots "sauvage", "vagabond", me sautent aux oreilles. En vérité, je traverse souvent les territoires extérieurs à la ville. Jusqu'ici je n'y ai rencontré personne. L'affaire semble importante car elle passionne des chats que je n'ai jusqu'ici que rarement croisés. Qui peut bien être la cible de ces commérages ? Ma curiosité est piquée et je m'approche d'un air nonchalant, dans le but d'en apprendre plus.